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Le Roi du Café détruit en 2008 se serait-il vengé ?

 Le "Roi du Café" se serait-il vengé ?

Le "Roi du Café" se serait-il vengé ?

Comme les choses sont bizarres tout de même ! En 1971, alors que le "Roi du Café" de mon vieux père fermait ses portes définitivement et que ses volets rouges (Photo ci-dessus) allaient rester un moment clos face à cette rue de la Gare que ce bar-restaurant avait longtemps contribué à animer, il faudra attendre la fin du XXème siècle pour qu'on détruise ce qui avait pourtant résisté jusqu'à l'été 1944 à quatre années d'occupation nazie. Mais cette fois-ci définitivement car si le "Roi du Café" avait succédé en 1946 dans les mêmes murs à l'ancienne Cantine de la Gare reprise en 1933, en ce mois de juin 1971 à mon retour de l'armée, il avait fallu décamper et laisser derrière moi vingt années de souvenirs ! Surtout les miens ! Certes, nous n'y avions pas toujours vécu comme des coqs en pâte dans cette vieille et ancienne maison de maître bâtie en 1860 un siècle plus tôt mais, que de souvenirs m'y rattachaient encore quand il a fallu partir. Jamais plus je ne reverrai cette bâtisse, même six ans plus tard en 1977 alors que j'avais pourtant garé ma voiture à proximité et que rien n'avait encore changé ! Ni les entrepôts de la Maison FAYE toujours debout, ni cette rue de la Haie-Coq que je descendais en revenant du collège Paul Doumer, ni ma chère rue de la Gare. Sans doute avais-je eu peur de fondre en larmes, moi qui n'avais jamais su contenir mes émotions ! 

Aussi, en février 2012, quand j'ai appris que l'ensemble du quartier de mon enfance avait été détruit, ai-je eu l'envie de faire appel à ma mémoire et aux souvenirs que je gardais de ce lieu et des gens que j'y avais côtoyé ! Et en moins d'un mois surgiront des pages et des pages illustrées de photos conservées par une soeur que je n'avais plus revue depuis une quinzaine d'années ! Comme s'il était apparu soudain en moi que je me devais de rendre hommage à un quartier que l'on avait décidé de sacrifier, sans doute pour une histoire de gros sous et comme s'il était devenu important pour moi que tous ne meurent pas une seconde fois. Ne m'appartenait-il pas de rendre hommage aussi à tous ceux qui avaient disparu en laissant la place à un complexe marchand du nom de Millénaire ? Lorsque je me retrouverai en février 2013 dans ce qui avait résisté aux bulldozers, je n'y retrouverai hélas plus rien de ce que j'avais connu, en dehors peut-être d'un dépôt de tabac Porte d'Aubervilliers et de la Mairie d'Aubervilliers. Sans même avoir eu le temps de préparer pour une dédicace organisée à la va-vite une cinquantaine de ces Histoires d'Avant que j'avais préparées pour l'occasion. Déjà en ce triste mois de Février 2013, un sentiment prédominait : celui que ce Millénaire aurait bien du mal à s'imposer et depuis, tout l'a confirmé puisque nombreuses sont les nouvelles échoppes qui ont dû fermer. 

Le "Roi du Café" se serait-il vengé ?

C'est cette quête de souvenirs qui m'amènera quasiment dix ans plus tard à entreprendre d'autres recherches. Il fallait que j'essaie de comprendre ce qui avait pu se passer dans ce quartier. Pourquoi on avait décidé de sacrifier une première fois ceux qui avaient dû partir à la guerre en septembre 1939 comme mon vieux père et, pourquoi, trente-deux ans plus tard on avait soudain décidé de tout détruire et d'exproprier ceux qui s'étaient battus à leur retour d'un conflit meurtrier en mai 1945 pour redémarrer quelque chose. Les travaux de conception de ce Millénaire ne seront néanmoins lancés qu'en 2008 et au début de l'année 2000 subsistaient encore avec le charbonnier Maurice (Photo ci-dessus) des traces de ce quartier du charbon qui nous avait nourri bon gré, mal gré.

Et depuis, depuis que s'est-il passé à l'endroit même où se tenait ce "Roi du Café" juste rue du docteur Troncin qu'on avait tracée à même la courette des Transports FAYE et qui faisait curieusement face à ce qu'avait été mon ancienne demeure du 33 rue de la Gare. J'assisterai impuissant à des débats qui me laisseront même perplexe. J'aurai bien entendu l'occasion de pénétrer dans ce Millénaire resté désert deux ans après le lancement du projet en avril 2011. Un endroit où, déjà, les premiers qui avaient cru pouvoir réussir à dompter les éléments étaient obligés de partir à leur tour. Comme ce sera le cas de l'enseigne BOULANGER puis de la FNAC qui, dès le mois d'octobre 2012 avait compris qu'elle s'était fourvoyée en implantant un magasin dans de tels lieux. Pourtant, tout avait été vendu à grands renforts de publicités comme cette vidéo trompeuse de l'architecte concepteur qui suit cet article. Inutile de dire qu'après la crise sanitaire du Printemps 2020 les dégâts seront encore plus conséquents et que beaucoup d'autres entreprises seront contraintes de baisser leur rideau à leur tour. Sans que l'affaire n'écorne cependant les promoteurs avisés qu'auront été ICADE et KLEPIERRE. Certains observateurs n'hésiteront pas à dire que « Ce centre c'était une catastrophe naturelle.» Conçu pour accueillir quatorze millions de visiteurs, il n'y viendra en effet que six millions la première année et sans doute encore moins après 2020 ! Ainsi donc le karma des lieux, en admettant qu'il y en ait un, aura joué un bien mauvais tour aux nouveaux arrivants, rendant finalement justice à ceux que l'on avait cru devoir exproprier jusqu'en 2008 en rasant l'ensemble des masures où ils avaient vécu !

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Louis PETRIAC 

C'ETAIT LE ROI DU CAFE, Louis PETRIAC, ISBN 978-2-918296-50-8